Jour 2, de Val d'Izé à St Aubin du Cormier, kilomètre 41

Mercredi 18 mai 2016, GR37






Certains jours ne sont pas faits pour mettre un randonneur dehors. J'aurais jeté un œil plus attentif à la météo, je me serais terré dans un troquet, j'aurais appelé un taxi afin qu'il me propulse d'un seul jet de diesel dans le premier café venu de St-Aubin-du-Cormier.
Ce soir je suis attablé dans une pizzéria.  Comme pour me narguer, le soleil éclaire les murs ocres du restaurant. Je suis le seul client hormis deux habitués calés au bar sirotant un jaune qui fait suite à une bière. La tambouille n'a rien d'exceptionnelle mais elle me repaît. C'est l'essentiel au regard du prix. Et le rosé n'est pas si mal. Je suis à l'abri d'une ondée et mieux installé pour écrire que dans le cabanon du camping. Sur la même place, une crêperie avait l'air plus accueillante. Mais il me fallait des sucres lents. Les sucres lents se trouvent dans les pâtes  et les pâtes dans les pizzeria. Il me fallait obligatoirement faire le choix de la pizzeria. CQFD. N'empêche que lorsque après avoir quitté la pizzeria je suis passé devant la crêperie j'ai pu constater qu'elle avait nettement plus de succès. Tant pis.
Ce matin après l'achat de quelques victuailles pour le pique-nique du midi, je suis sorti de Val d'Izé sous un ciel chargé et uniforme. Je ne fus donc pas étonné, en longeant le chemin empierré que j'empruntai après avoir quitté la route, de subir un crachin un peu soutenu. Du paysage pas grand-chose à retenir sous ce ciel triste, si ce n'était un champ immense couvert de pissenlits, comme si ils avaient été volontairement cultivés. Le paysage était identique à celui de la veille en plus morose. Une pluie plus  soutenue a commencé à m'ennuyer dans une longue ligne droite, large chemin bordé d'arbres. J'ai enfilé le poncho, planqué l'appareil photo. S'est ensuivi une accalmie. Courte. Et l'averse cinglante a pris le relais. J'en ai perdu mon latin et le chemin. A l'abord d'une intersection il y avait absence de balisage pour me proposer de tourner à gauche ou à droite. Je regardai la carte brièvement pour éviter qu'elle ne se transforma en torchon trempé sous l'assaut des aiguilles liquides. J'avais pris soin de faire des copies du guide afin qu'il ne m'encombra pas. Il était au chaud dans le sac à dos et à l'abri des vicissitudes météorologiques. L'inconvénient est la vulnérabilité du papier face à la volonté destructrice de l'eau venue de là-haut. Je fis le point à la va-vite avant que l'encre ne se répandit lamentablement en pâtés informes sur le papier, et je tournai à gauche. Et la pluie de redoubler d'intensité. Mais que faisais-je ici sur cette route à me prendre la saucée ? Je marchais 1 km… pas de balisage. Je retournais sur mes pas, parvins à l'intersection où étaient nées mes interrogations, la dépassai et 50 m plus loin je vis les traits de peintures rouge et blanc… 25 mns de perdues et surtout les chaussures avaient pris l'eau d'un seul coup  après que le bas de pantalon se fut saturé de flotte. Ca faisait Schploc… "Pas grave" qu'il dit, "c'est tiède". Je repris le cours (d'eau) de ma pérégrination. Me voilà sur la bonne voie (d'eau). J'avançais. La pluie ne me gênait même plus. Je m'inquiétai
s cependant de savoir comment sécher mes chaussures à l'étape, d'autant plus que je devais passer la nuit dans un cabanon au camping. Et je craignais un peu de choper des ampoules. Perspective peu lumineuse. J'aviserai.
La pluie baissa d'intensité, se calma pour enfin avoir la bonté de s'arrêter. Il était midi lorsque j'abordai un hameau. Hameau sweet hameau. Il y avait un auvent accolé à une dépendance. Je décidai d'y faire halte et de déjeuner là, à l'abri… du soleil qui daigna faire de brèves mais agréables apparitions. 

Au sec

Je retirai chaussures, chaussettes et semelles que j'essorai au maximum. Je ne pensais pas que l'on pouvait tant suer dans des chaussures de marche. J'enfournai mon sandwich, ma banane, bus un bon coup. Admirai le paysage et les maisons de pierres. Je repartis le moral au temps variable. 

Le bon chemin

Heureusement que les sentiers parcourus étaient dans cette contrée plutôt plaisants et pas trop inondés malgré les fortes averses. Je pus enfin faire quelques photos sèches. Le ciel,  envahi de nuages de toutes les nuances de gris, jouait avec le soleil. Cela créait quelques belles couleurs dans ce ciel de plomb qui contrastait avec le vert des champs. 

Ciel électrique

A nouveau les nuages devinrent menaçants.

Ciel menaçant

Parti dans mes pensées, comme tout bon marcheur un peu rêveur et alors qu'il se remettait à légèrement pleuvoir, à une intersection je zappai une balise et au lieu de tourner à droite (j'ai du mal avec la droite en général) je m'enfonçai tout droit dans un joli chemin plus attirant que la route qu'il m'aurait fallu suivre. La pluie s'intensifia alors que je progressais dans ce chemin trompeur qui desservait un peu plus loin une maison avec un préau à voitures. Je bafouai le droit de propriété, entrai dans le jardin et m'engouffrai sous l'appentis. Ouf ! j'étais à l'abri. Je ne serai pas trempé une seconde fois. 

Encore quelques gouttes

Là, je consultai le plan car un doute m'assaillait. Je n'avais pas vu une seule balise depuis que j'avais abordé ce chemin. Je fis le point et m'aperçus de mon erreur. Il fallut retourner sur mes pas une fois l'averse stoppée.
J'étais à présent à peu de distance de st Aubin. Le soleil était de retour et j'abordais guilleret le chemin qui traversait un bois. Je "circonvolutionnais" au gré des marques salvatrices que j'observais avec une attention redoublée (l'expérience) et qui faisaient un jeu de piste.


Soleil en sous-bois

Je longeais ensuite une vaste prairie sur ma droite tandis que s'élevait abrupte une immense roche sur ma gauche comme taillée à la tronçonneuse. Ici débutait la zone de chaos de la Roche-Piquée ; c'était de toute beauté. Peut être allais-je y croiser une fée choucarde et avenante, baguette magique et vêtements vaporeux, ou bien une gente dame évanescente surgit de la roche et qui m'accompagnerait pour le reste du chemin menant aux ruines du château. Ou qui voudrait tout simplement par je ne sais quelle magie me sécher les pompes et non pas me les cirer.

Chaos

Ça sentait l'écurie. Je slalomais à travers les roches et les arbres et atteignais le bord de l'étang. Je passai devant les restes squelettiques de ce qui fut un donjon et le temps fit d'un coup la grimace. 


Le donjon de St-Aubin-du -Cormier

J'essuyai une nouvelle averse et n'eus que le temps de me glisser sous un abri à bois. Je devenais le roi de l'esquive. "C'est une averse de rien du tout", ricana-t-il sous son abri de fortune. 5 minutes.
Devais-je directement me rendre au camping ? Je passai par le centre ville et décidai de me rendre à la mairie. Grand bien me fît. J'y appris  que le responsable du camping n'était présent qu'à partir de 18 heures et il était 15h30. Compréhensive et fort sympathique, la secrétaire de mairie réussit non sans mal à contacter deux fonctionnaires municipaux qui pourraient m'emmener au camping et m'ouvrir un des deux chalets. Pendant l'attente la pluie refit son apparition et tombait drue. Ça claquait sur les vitres des fenêtres. Nous attendîmes que l'esprit du dieu de la pluie fut dans de meilleures dispositions pour nous engouffrer dans le fourgon et nous rendre au camping.

Pluie encore

Le chalet était minuscule mais bien suffisant pour moi seul. Sauvé. J'ôtai mes chaussures trempées, les chaussettes qui ne l'étaient pas moins et les semelles qui leurs faisaient concurrence, et disposai tout ça à sécher au soleil qui était revenu. Je pris une douche chaude et longue qui me retapa. Puis je me précipitai, en attendant 18 h et la venue du gardien, vers le premier bar à pression venu. Le bonheur.

Clin d'oeil

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