Saison 2, jour 4, Cancale à la Guimorais

Jeudi 17 septembre


La pluie et le vent avaient imposé leur loi durant la nuit, mais au matin leur ardeur s'était atténuée. Les nuages restaient présents, mais ils présentaient une apparence moins uniforme. Ce n'était pas le grand beau temps toutefois je pouvais espérer marcher sous de bonnes conditions.
Le matin après le petit déjeuner je fis quelques courses à la supérette du centre. Quelques temps plus tard, alors que, chargé du sac à dos et revêtu prudemment du poncho, je faisais mes adieux à mes hôtes, une violente averse secoua Cancale. Prudemment je retardai mon départ, attendant que les éléments se calmassent. Ils s'apaisèrent assez rapidement et de la même manière je pris le départ sous un ciel incertain.
J'abordai vite le GR34 éloigné seulement de quelques dizaines de mètres de la maison. Le chemin étroit et accidenté qui furetait entre les habitations et la rive en corniche gardait les traces de la pluie tombée en abondance. Une brève averse survint mais fut prestement balayée par le vent avec la complicité du soleil qui refit son apparition sous un ciel mitigé. Ce fut la dernière offensive de la pluie.
Le paysage était magnifique. Le ciel nuageux et plombé rivalisant avec les assauts du soleil, peignait ainsi la Manche et la côte de tonalités contrastées.

Peignait ainsi la Manche

Je m'en fus sur le sentier côtier vaillamment, profitant du miracle de la lumière en passant à proximités des îles jalonnant mon parcours, le Rocher de Cancale précédant l'Île des Rimains et son ancien fort Vauban acheté par le maître du pain L. Poilâne puis en 2012 par Pierre Kosciusko-Morizet frère de l'ancienne ministre sarkoziste. Que du beau monde.
 
L'Île des Rimains

Ensuite je marchais en corniche le long de grande plages rocheuses au dessus desquelles s'élevaient de belles demeures et de fiers manoirs ; sur l'eau ridées et bleue claire mouillaient de nombreux bateaux de plaisance. Je passai la pointe du Chatry, redescendis sur Port Mer pour aborder après une nouvelle ascension le Chenal de la Vieille Rivière qui sépare la Pointe du Grouin de l'île des Landes, paradis ornithologique vierge de toute occupation humaine.

Port Mer

Chenal de la Vieille Rivière

A l'extrémité de la pointe, plein nord, le vent soufflait fort, si fort que l'enveloppe protégeant mon sac à dos s'envola pour atterrir dans les ajoncs à quelques mètres du chemin. Je dus enjamber le fil de fer séparant le chemin de la végétation pour après quelques efforts et l'aide de mon bâton de marche, réussir à libérer le film plastique des griffes des arbustes épineux. Bien que le franchissement de ces limites soit prohibé, je m'en serais voulu que cette vile protection polyester se perde dans la nature sauvage… ou presque, envahie qu'elle était de touristes bousculés par les bourrasques. J'avais prévu de manger dans ce lieu sauvage, mais il y avait trop de fâcheux en ce bout de monde pour apprécier la pause à sa juste valeur. Après coup, je fais le constat que je profitai peu de la beauté du site, fuyant le vent réfrigérant et ses rafales.

La beauté du site

Je continuai sur le sentier orienté sud-ouest. La falaise herbeuse plongeait dans l'océan agité et recevait de plein fouet les rafales venteuses qui me déstabilisaient, me coupaient parfois le souffle et rendaient mon avancée pénible. Heureusement que le vent me rabattait côté terre car je crois bien que l'inverse m'aurait fourrer dans de périlleuses situations. Enfin je m'arrêtai derrière une haie d'arbuste à l'abri pour prendre mon casse-croûte. Je n'avais pas vraiment faim et ce peu d'appétit était de plus renforcé par le goût insipide du sandwich dont le pain caoutchouteux n'incitait guère au masticage. Je le savais pourtant : ne jamais acheter de sandwichs dans les supérettes. Heureusement j'avais une banane.
A l'abord de la pointe de la Moulière le vent se calma un peu ou tout au moins je me trouvai à l'abri de ses humeurs. Le temps ensoleillé avait définitivement pris le dessus aussi me débarrassai-je du poncho sous lequel je suais un peu.

Le vent se calma un peu
 
Que c'était beau, ces falaises, le vert sombre de la lande et les rochers sculptés dans l'à pic. La mer, turquoise, moutonnait à chaque assaut des vagues.
Je traçais mon chemin pour parvenir, après avoir côtoyé une zone marécageuse et longé les dunes de la plage du Verger, à une chapelle du XIXè. Elle s'aperçoit de suffisamment loin pour donner l'envie d'y faire halte. Auprès de l'édifice un couple de randonneurs terminait de déjeuner ; nous échangeâmes quelques paroles cordiales ; leur destination finale était St Malo.

Elle s'aperçoit de loin

Je progressais sur le sentier perché sur des falaises très découpées, hérissées de dents, d'éperons, de blocs sculptés par l'érosion. Ainsi ciselées les roches présentaient l'apparence d'énormes colonnes dorsales épineuses de quelconques monstres préhistoriques. Et les vagues sauvages en écumes blanches de battre ces flancs ouverts au vent.

D'énormes colonnes dorsales

Je parvins enfin à la plage Duguesclin. A quelques encablures émerge un îlot où fut édifié au XIIè un fort, repère de brigands ; Un peu comme sur Monaco, en plus honnête. Bien plus tard, de cette bâtisse féodale s'échapperaient de savantes mélodies destinées à habiller les riches paroles sublimes du poète Léo Ferré.

A quelques encablures

Cette plage est interminable. Le vent projetait sur la route qui la longe une myriade de grains de sable fin. Progressant sur l'asphalte j'appréciai malgré tout son relief uniforme en apercevant plus loin le chemin qui remontait sérieusement vers la pointe des Grands Nez ; le mien me soufflait que j'allais en baver. C'est d'ailleurs dans cette rude ascension que l'ampoule se réveilla et se rappela à mon bon souvenir. Dans les descentes le mal s'estompait, mais il se ravivait lorsqu'en montée la chaussure appuyait sur l'arrière du talon.
Cette pointe contournée je marchais le long de l'Anse de la Touesse bordée d'une belle plage de sable blanc, festonnée de l'étroit ourlet dunaire couvert d'oyats et jalonné comme il se doit d'une haie de ganivelle. Ballottés par la houles, quelques bateaux blancs s'agitaient.

Quelques bateaux blancs s'agitaient

Encore une bonne heure et j'arriverai à bon port ou plutôt à bon camping, celui de la Guimorais. Comme souvent à l'approche de l'écurie, les derniers hectomètres furent les plus longs, mais la vue enchanteresse me permettait de les franchir avec entrain bien que la brûlure au talon s'enhardissait. Sur cette partie de côtes on voit les vestiges de blockhaus incrustés dans la falaise.

Vestiges de blockhaus incrustés

Au camping, je posai mon sac dans un bungalow en toile et me livrai au rituel habituel avant de descendre sur la plage faire quelques photos de fin de journée sur les Chevrets et l'Île Besnard. Ensuite je me réfugiai dans la quiétude du restaurant de bord de mer où je dégustai un plat de tagliatelles au poissons fumés, face à la mer qui s'était retirée.

Sur les Chevrets

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